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Campagne du Soldat Joseph MATHIEU

52éme Régiment d'Artillerie

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Joseph MATHIEU est appelé au service armée le 9 octobre 1912 et rejoint le jour même le 52ème Régiment d'Artillerie basé à Angoulème.


Après quelques jours passés dans les cantonnements de mobilisation, au voisinage d'Angoulême, les unités s'embarquent, qui à Angoulême, qui à Ruelle. Le voyage dure deux jours ; il fait très chaud. Débarquement en Argonne et aussitôt le bivouac. On s'installe au petit bonheur dans les champs, faisant un peu de cuisine. Dans la nuit, on entend quelques coups de feu tirés par de braves gardes-voie sur des ombres probablement.

Le lendemain, commencent des marches d'approche. Interminables colonnes de corps d'armée où l'allure de marche est celle de l'infanterie. Près de Mouzay le bruit court que des avant-gardes ennemies sont à Stenay ; immédiatement les chevaux sont attelés et les marmites culbutées ; on se hâte vers Stenay qu'on atteint et traverse dans le plus grand calme. Pas la moindre trace d'ennemis dans le pays.

Plusieurs jours de repos à Cervizy et Martincourt font le plus grand bien.



La Belgique et la retraite.



Le 22 août 1914, entrée en Belgique. Après avoir traversé la gentille petite ville de Florenville, on se dirige vers le nord, traversant la magnifique forêt d'Herbeumont. Le canon tonne plus fort et, à la sortie des bois, on aperçoit quelques cadavres de chevaux, les premiers. La colonne est survolée par plusieurs avions ennemis volant à faible hauteur. Les pièces sont mises en batterie le soir même, mais on ne tire pas et, pour la nuit, un cantonnement-bivouac est organisé.

Le 23, mise en batterie dans la région de Straimont. L'attente est de courte durée ; bientôt, les groupes sont pris sous le feu ennemi heureusement mal réglé. Ce sont les premiers obus que l'on reçoit, et le tir semble impressionnant.

On n'a pas l'occasion de tirer. L'ordre de se replier arrive : toute l'artillerie du corps d'armée doit franchir un unique passage à niveau et faire quelques centaines de mètres sur une route vue de l'ennemi. Les artilleurs allemands n'allongent pas leur tir ; c'est sans perte qu'on se tire de cette première affaire.

La grande forêt est de nouveau traversée, la route est encombrée de voitures. Au milieu de tous ces véhicules, des cavaliers vont et viennent, des fantassins se glissent. A la sortie de Florenville, nouvelle mise en batterie avec mission de tirer sur l'ennemi qui déboucherait de la forêt d'Herbeumont ; tout le régiment est au complet.

Nouveau repli dans l'après-midi ; la frontière est retraversée : notre séjour en Belgique a été d'une trentaine d'heures et nous n'avons pas tiré un coup de canon.



Blagny.



La nuit est passée au bivouac près de Deux-Villes. Dès le petit jour, des reconnaissances sont exécutées et les groupes prennent position sur les hauteurs qui dominent Blagny et Charbeaux. Pour la première fois les batteries ouvrent le feu sur l'ennemi et battent des colonnes signalées par la poussière qu'elles soulèvent. En dehors de ces tirs, surveillance sur les lisières sud des bois du Banel.

Vers 9 heures, l'artillerie ennemie qui a pris position arrose copieusement les pentes sur lesquelles nous nous trouvons. Le tir commence par des fusants tellement hauts que beaucoup s'amusent de ce qu'ils pensent être de l'inexpérience. Les éclatements sont bientôt réglés et les gerbes sont à bonne hauteur. Les coups proviennent des bois de Pure, bois de Matton, bois du Banel et de Messincourt. Au début de l'après-midi, le tir ennemi devient plus précis.

L'infanterie se replie en passant sur la crête qui est devant les batteries et attire sur ces dernières le tir de l'ennemi. Les servants continuent à servir leur matériel sous le feu et plusieurs pièces sont sous les balles de l'infanterie ennemie. Le régiment subit ses premières pertes, pas mal de chevaux tués ; des conducteurs un peu affolés ; une batterie laisse du matériel sur le terrain.

Pour enrayer l'avance allemande, les groupes viennent de faire une très grosse consommation de munitions ; ils réussissent en partie à arrêter l'ennemi, mais sur un point, au mont Tilleul, des éléments adverses ont pu progresser et menacent la crête où il y a du matériel.

La Chiers est traversée pendant la nuit ; les 3ème et 4ème groupes font une marche de flanc en présence de l'ennemi. Quelques mises en batterie rapides sur route, quelques salves dans la nuit, puis la marche est reprise vers l'arrière. L'horizon est tout illuminé par les incendies, en grande partie allumés par l'ennemi.

Le 25, les groupes se reconstituent ; ils occupent plusieurs positions autour de Vaux, Malandin, Mouzon ; tirent sur les routes et points de rassemblement probables de la rive droite, puis franchissent, la nuit, la Meuse à Mouzon et bivouaquent au moulin du Grésil et au moulin de la Hamelle.



Yonq - La Meuse - Beaumont.



Le 26, c'est la Meuse qu'il faut défendre. Le régiment occupe des positions près de Yoncq ; il tire activement, mais ne peut empêcher l'ennemi de franchir le fleuve au cours de la nuit qu'on passe sous la pluie, sur la position. Le 27, des positions sont prises près de Beaumont.



Flaba - La Besace.



Le 28 au matin, le régiment monte s'installer sur les hauteurs de Flaba où se trouve déjà une nombreuse artillerie. Une position est occupée au sud de la Besace ; elle doit être évacuée après quelques tirs, les pièces étant prises sous le feu de l'infanterie ennemie qui a pu progresser en s'infiltrant dans les champs. On tire jusqu'au dernier moment, alors que les avant-trains sont déjà presque accrochés.

Ensuite, triste retraite ; une colonne hétéroclite et bizarre fait l'ascension de la côte de Stonne, des sections de munitions et des batteries sont enchevêtrées, des fantassins s'accrochent aux voitures pour se reposer, des charrettes de toute nature s'intercalent dans la colonne. Le mouvement s'exécute bien, car l'ennemi ne tire pas.

Dans la nuit, le bivouac est organisé à Châtillon-sur-Bar, Verrières, Authe. Le 29, l'artillerie de corps, groupée à Châtillon-sur-Bar, détache deux groupes qui s'installent à deux kilomètres nord-ouest de Brieulles-sur-Bar et restent toute la journée en surveillance sur la route de Stonne aux Grandes-Armoises. Le feu n'est pas ouvert. Les deux groupes libres se dirigent sur Vouziers dans la journée ; les autres les rejoignent le soir et tout le régiment s'installe au quartier de cavalerie. Chevaux et personnel, installés dans les écuries, le manège et les chambres, prennent un repos bien gagné.

Le 30, dans l'après-midi, alerte : les deux premiers groupes se portent au bivouac au nord de Vouziers, les deux derniers en font autant vers Ballay.



Yonq - Les Alleux.



La nuit est moins calme. Les 3ème et 4ème groupes montent prendre position près du village des Alleux ; les 1er et 2ème groupes ne se mettent en route qu'au jour : ils traversent l'Aisne et vont s'installer au sud-est de Voncq, dans un terrain accidenté, au milieu des pommiers.

Cette journée du 31 est dure pour le régiment ; de très nombreux tirs sont exécutés au sud du Chesne et dans la région des Petites-Armoises. Le 4ème groupe est repéré par des avions ennemis et est pris à partie par des obusiers, il subit de grosses pertes, amène les avant-trains et quitte la position sous un feu violent parfaitement réglé.

Le soir, rassemblement des quatre groupes au bivouac entre Vandy et Terron-sur-Aisne. La nuit est noire et froide. De bonne heure, le signal du départ est donné ; c'est encore vers l'arrière qu'on se dirige. Vouziers est traversé de nouveau, mais tristement ; la ville sera abandonnée sans combat.

Par une chaleur terrible, le régiment s'engage sur la grand'route, traverse Monthois sans s'y arrêter et, mélangé aux populations qui fuient, arrive à Séchault où on forme le parc dans un grand verger. Défense absolue de s'écarter. Le repos n'est que de courte durée ; le soir même, il faut partir. Dans l'obscurité, la retraite se continue ; on circule dans des chemins passablement mauvais et, vers minuit, on bivouaque à Tahure.



Souain.



Le 2 septembre 1914, tout le régiment prend position au nord de Souain. Ses objectifs sont : Somme-Py et Sainte-Marie-à-Py. L'infanterie peut faire parvenir au 4ème groupe le renseignement que les lisières de Somme-Py sont très fortement occupées. Les batteries exécutent sur ces lisières un tir jusqu'à épuisement de leurs coffres, vrai feu roulant, mais le résultat cherché est obtenu : on aperçoit des Allemands en débandade se sauver sur les hauteurs au nord de la ville. Dans leur retraite précipitée, les fantassins allemands ont pris des gerbes de blé ou d'avoine et les mettent sur leur dos pour se protéger.

Le 2ème<:sup> groupe, qui s'est installé dans les clairières de petits bois de sapins, est pas mal arrosé par l'artillerie ennemie ; il subit quelques pertes.

L'ordre de retraite arrive comme tous les soirs. A l'arrivée à Suippes on bivouaque. La nuit se passe à peu près tranquille, mais de bonne heure le réveil est sonné par les premiers obus ennemis qui éclatent sur la ville. Une nouvelle fois, le régiment se remet en marche vers l'arrière. Les 1er et 2ème groupes s'arrêtent une partie de la journée à Courtisols et, vers le soir, s'en vont bivouaquer à Saint-Amand-sur-Fion. Le 3ème groupe prend part à un combat dans la région de Saint-Hilaire-au-Temple, puis traverse Courtisols et rejoint les deux premiers à Saint-Amand-sur-Fion.

Le repos ne dure guère. A 22 heures l'ordre de départ est donné ; tout le monde est épuisé. On traverse Vitry-le-François vers le milieu de la nuit ; c'est lugubre. La ville est déserte et le roulement du matériel sur le pavé se répercute dans le lointain. Quelques heures de repos à Frignicourt, où chacun dort entre les pieds des chevaux, et en route à nouveau. Le régiment est dépassé par des colonnes de cuirassiers ; très éprouvés par les récents combats, beaucoup manquent à l'appel et le nombre des chevaux tenus en main est considérable. De leur côté, ces pauvres animaux font pitié ; presque tous ont le dos emporté et saignant, ils sont restés si longtemps sans être dessellés.

Alors que la colonne continue à avancer dans une demi-inconscience, on arrive à MargerieHancourt où tout le monde bivouaque ; les trois groupes sont réunis. On est tellement fatigué qu'on se rend à peine compte que la marche est terminée. Le 4ème groupe fait bande à part ; il vient bivouaquer à Pogny, puis combat au « Signal des Mouettes » (nord-est de la Chaussée-sur-Marne), où il reste en position jusqu'à la nuit bien que ses voisins se soient retirés sous la menace de la cavalerie ennemie. Une de ses batteries, la 10ème occupe sur l'ordre du corps d'armée une position abandonnée par un autre groupe.

Le 5, le régiment est à Saint-Louvent, près de Châtelraould. Il met en batterie le premier, exécute des tirs sur la gare de Vitry-le-François et vient en aide au corps colonial qui est à sa droite (à l'est). Prenant à partie des batteries ennemies vues en action, il exécute sur elles un tir progressif à obus à balles au moment où elles amènent les avant-trains et leur fait subir de fortes pertes. C'est le début de la bataille de la Marne dans cette région du champ de bataille.

Les 1er, 2ème et 3ème groupes, arrivés le 4 à Margerie, entendent au cours de l'après-midi le bruit d'une violente lutte d'artillerie. Après une nuit calme, tout le monde profite de la liberté. Vers midi, rassemblement. l'ordre du jour du général JOFFRE est communiqué.

Dans l'après-midi, les crêtes du côté de Vitry-le-François sont couronnées de gros nuages noirs ; le combat doit être acharné et, de part et d'autre, il est probable que personne ne veut céder.



La Marne.



Le 5 septembre 1914, après-midi, les 1er et 3ème groupes quittent le bivouac ; le 2ème reste seul à Margerie-Hancourt. Les quatre groupes du régiment, bien qu'opérant dans la même région, se sont trouvés dans des conditions bien différentes.






Joseph MATHIEU est tué le 7 septembre 1914 à Chatel Raould (Marne).